ENTENDU. La campagne vue du bar « Le St Maurice » à La Rochelle – Mireuil (3)

Publié le par Laurent Kaczmarek

 Amra, 72 ans, le manœuvre déraciné

 

Retraité depuis 200, c’est un personnage humble et touchant, qui a besoin de parler. Kabyle, berbère, il est arrivé en France en 1961, à 13-14 ans, avant l’indépendance de l’Algérie. Avec son accent et le bruit ambiant, je ne comprends pas tout. Il parle surtout de son passé. Son oncle (ou plutôt un cousin de son père) a fait 14-18 et l’Indochine. La guerre, c’est « pas propre », ça « tourne mal ». Pourquoi on se bagarre ?, demande-t-il.

 

Lui était avec les Français, « comme les harkis ». En 61, il était Français musulman. Depuis l’indépendance, il est Algérien et plus Français. Du coup, il ne vote pas, sauf aux prud’hommes. Mais ses enfants sont Français. On sent comme une blessure. Il évoque ses parents, « morts là-bas ».

 

Il a travaillé 40 ans, dont 21 dans une usine d’engrais à Aytré, jusqu’à la fermeture. Il dit que dans les années 70, il y avait du boulot partout. « On était embauché aussitôt. Aujourd’hui on n’embauche plus. » Il ne sait pas pourquoi. Alors, la première chose à faire, c’est de donner du travail. « Avec Pompidou, de Gaulle, il n’y avait pas de problème. Aujourd’hui, il faut un diplôme pour balayer. (…) Il y avait Peugeot-Simca à La Rochelle dans le temps. » Séquence nostalgie.

 

Puis, les usines sont parties, il n’y a plus de travail, rien du tout. Les robots remplacent les gens. Il ne sait pas qui a fait ça. Les politiques ? « Y’en a pas un qui va rattrapper. » Mais, il a une certaine admiration pour Michel Crépeau, une figure de La Rochelle.

 

Il montre un islam ouvert : « Le halal ? C’est pas un problème. Chacun fait ce qu’il veut. » Lui ne fume pas, ne boit pas, à part de l’eau et du café. Il me demande pourquoi les jeunes et les pauvres boivent, alors qu’ils ne peuvent plus travailler.

 

« J’aime tout le monde », dit-il. On sent qu’il brûle de faire quelque chose pour les autres. Si « Tu me parles, je te parles », mais « je saute pas sur les autres ». Il marque ses distances.

 

Frédéric, 45 ans demandeur d’emploi et Christophe, 41 ans, en attente d’un contrat aidé : loin du travail

Pascal, 38 ans, en reconstruction.

Conclusion

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Publié dans Portraits

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