ENTENDU. L'élection de François Hollande vue d'un café de Puilboreau : La France de droite désabusée (2)

Publié le par Laurent Kaczmarek

Bruno, 46 ans : l’artisan droite décomplexée

 

 

Il est artisan électricien et me dit très clairement qu’il est de droite. Pour lui, Hollande, c’est « plus de charges ». Il est très critique : selon lui, il n’a pas de personnalité ; il est très faible ; il ne sait pas s’exprimer (par comparaison avec Nicolas Sarkozy). « Il faudrait qu’il ait des idées lui-même… », énonce-t-il. Il admet qu’il aimerait « le voir au combat » dans les négociations internationales. Sarko y allait, mais Hollande aura peur, pense-t-il.

 

Le résultat électoral ne lui paraît pas surprenant, mais il juge le score « pas terrible ». Pour lui, la France n’a pas basculé à gauche et les socialistes ne pourront jamais tenir leur programme. Il demande « Quelles idées ont-ils, à part critiquer ? Embaucher 60 000 profs ? Mais ils ne seront pas embauchés pour cinq ans mais à vie ! »

 

Il prend très rarement des vacances et son café du matin représente son moment de détente. Il n’a voté que deux fois dans sa vie en 2007 et 2012, séduit par Sarkozy. Il dit qu’aujourd’hui les gens sont plus tolérants : « on peut parler de politique, il n’y aura pas d’altercation ». La parole est libérée. Dans un bar, il y a des artisans, des écrivains, des ouvriers, des infirmières, des gens qui ramassent les poubelles : tout le monde se côtoie et discute. C’est du débat. Pourtant, c’est « un peu conflictuel » car le Français est « un peu hypocrite », « gueulard ».

 

Selon lui, si Sarkozy n’avait pas eu la crise, « il aurait été moins critiqué ». Ca a été une mise à mort, dit-il. Il avait mis des gens de gauche à des bonnes places, DSK au FMI. Chez mon interlocuteur, Dominique Strauss-Kahn est décrit comme quelqu’un de brillant et compétent, qui « présente beaucoup mieux » qu’Hollande. Ses frasques sexuelles, cela relève de la vie privée.

 

Hollande : « Il ne connaît rien, n’a rien fait en Corrèze ». Avec lui, « ça va être le bordel ». Ceux qui ont de l’argent vont partir. Il dit qu’en tant qu’artisan, il devait faire des chantiers dans trois magasins, mais qu’avec l’élection il n’en aura plus qu’un. Un patron qu’il connaît ferme quatre magasins (mais en garde une dizaine) et vire 18 personnes car il ne veut pas payer pour un gouvernement socialiste. Information non vérifiée. « On va voir le paquet de chômeurs qu’on va avoir », prédit-il. De même, la crise, « ce sera pire avec Hollande ».

 

Bayrou, c’est « ni oui, ni non ». Il le traite de « bâtard », de « merde ». Marine Le Pen, elle est critiquée de chaque côté, mais « il y a une évolution » dans son discours. Faire voter les étrangers est pour lui inadmissible. « Ils s’engraissent sur les Français ». « Il y a des gens qui profitent du système ». « Ca fait trente ans que ça dure, les conneries ». Des propos brut de décoffrage.

 

S’agissant du travail, il me parle de son fils de 18 ans qu’il a pris comme apprenti, mais à qui il ne fait pas de cadeau. Il a eu jusqu’à 4 salariés, mais aujourd’hui, il travaille seulement avec son fils.

 

Il dit qu’il faut mettre les jeunes au travail, leur « apprendre à bosser », « pour que les cotisations rentrent ». Le RSA rapporte trop par rapport au SMIC. Payer les gens en fonction des diplômes, c’est « une connerie ». Ce qui compte, c’est l’expérience. Quelqu’un qui a « 20 ans de boîte » mérite plus qu’un jeune diplômé. Et aujourd’hui, « une fois qu’un mec est formé, il se barre ailleurs ».  Au chômage, il prétend qu’il y a « 80 % de feignants et 20 % de gens qui ne trouvent pas dans leur profession ».

 

Il faut selon lui « rééduquer les gens » et commencer par ne pas dépenser plus que ce qu’on gagne. Comment une famille modeste peut-elle avoir 5 portables (dont des iPhone) et internet ?

 

Il parle d’envoyer des flics et des légionnaires dans les cités pour « foutre des branlées ».

 

S’il approuve l’euthanasie « pour ceux qui veulent », il est contre le mariage homosexuel (le pacs c’est bien, mais il ne faut pas appeler une union mariage) et surtout l’adoption par ces couples : « il faut arrêter les conneries ».

 

Etre indépendant, « c’est une liberté qui revient très cher ». Il admet qu’il n’aime pas être commandé. Il dit qu’avant 1985, les artisans gagnaient de l’argent, mais que ce n’est plus le cas.

 

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