SOURDINE. Les nouvelles classes moyennes par D. GOUX et E. MAURIN

Publié le par Laurent Kaczmarek

SOCIOLOGIE, LIVRE, classes moyennes

 

L'ouvrage Les nouvelles classes moyennes, de Dominique Goux et Eric Maurin (éd. Seuil, coll. La République des idées, 2012, 118 p.) invite à réfléchir sur leur place dans la société. La thèse des auteurs est que, contrairement à une idée répandue, les classes moyennes ont beaucoup plus profité des dernières décennies que les classes populaires.

 

"Ensemble - grandissant - de catégories intermédiaires, situées à égale distance des plus pauvres et des plus riches", elles ont maintenu leur position grâce à "une compétition sans merci pour les statuts professionnels les plus protégés, les quartiers de résidence les plus sûrs et les diplômes les plus recherchés" (p. 2).

 

Occupant les métiers d'artisan, commerçants, techniciens, professeurs des écoles, cadres B de la fonction publique, comptables, techniciens, représentants de commerce..., elles représente 30 % de la population active et disposent de ressources à quoi s'accrocher (diplômes, revenus, patrimoine, logement). Dotés d'un emploi assez sûr, ils sont cependant particulièrement sensibles aux conséquences d'une perte de celui-ci. Les classes moyennes regroupent ainsi "tous ceux qui ne sont pas pauvres, mais qui pourraient néanmoins le devenir dans un avenir proche, avec une probabilité faible mais réelle" (p. 25). Elles sont dans une position d'entre-deux, entre les ouvriers/employés et les cadres. Elles permettent de manière assez marquée la promotion sociale d'ouvriers ou employés.

 

Ces classes moyennes comptent beaucoup sur l'école. Elles surinvestissent dans l'enseignement supérieur et notamment les grandes écoles. Des données chiffrées montrent qu'au fil du temps l'écart avec les classes supérieures se réduit, tandis que celui avec les classes populaires reste constant (p. 66).

 

De même, "les classes moyennes n'ont rien lâché dans la compétition pour habiter les quartiers jugés les plus sûrs, les mieux fréquentés et les plus porteurs pour les enfants" (p. 93). Même au sein des classes moyennes, on vit principalement entre soi. Malgré la hausse des prix de l'immobiliers, la proportion de propriétaires et accédants à la propriété a progressé dans ces catégories (p. 107 et p. 109).

 

Les auteurs s'attachent aux flux et mobilités d'une classe à l'autre. D'une manière générale, comme de nombreux courants sociologiques, ils montrent une forte reproduction sociale*.

 

Dans notre période de croissance faible prolongée, "Il en résulte une incertitude larvée pesant sur la pérennité des emplois du secteur privé (y compris les plus qulifiés), et là se trouvent peut-être l'un des traitsles plus idiosyncrsiques de notre époque : l'idée que dans le privé, personne n'est à l'abri, même armé d'un diplôme du supérieur. Dans ce contexte très anxiogène, les emplois du public (et, à un moindre degré, des grandes entreprises à statut) représentent un refuge, notamment pour les personnes issues des classes moyennes, convaincus qu'un diplôme n'est plus en lui-même une protection suffisante, sauf à l'avoir converti en statut protégé." (p. 88).

 

Un problème politique majeur concerne la part contributive très élevée de cette population en matière fiscale (p. 113-114). Les auteurs préconisent ainsi un "retour vers des programmes moins explicitement ciblés vers des publics particuliers" (p. 117).

 

L'analyse est intéressante, même si l'on peut discuter l'approche assez étroite des classes moyennes, conduisant à en décrire une évolution plutôt favorable.

 

 

 

* Phénomène par lequel les enfants issus d'une classe sociale se retrouvent dans une proportion très élevée dans cette même classe sociale, contredisant le discours sur l'égalité des chances.

 

 

Publié dans Classes sociales

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